PÉKIN CORRESPONDANT
Bilan : 140 morts, plus de 800 blessés : des émeutes d'une gravité sans précédent ont éclaté, dimanche 5 juillet, à Urumqi, capitale de la province chinoise à majorité musulmane du Xinjiang, située dans le nord-ouest du pays. L'agence de presse officielle Chine nouvelle, qui avait d'abord fait état de 3 morts, affirmait que ces derniers étaient des Chinois hans, les émeutiers étant des membres de la communauté turcophone musulmane ouïgoure, qui exprime régulièrement sa frustration d'être placée sous la tutelle politique chinoise.
Bilan : 140 morts, plus de 800 blessés : des émeutes d'une gravité sans précédent ont éclaté, dimanche 5 juillet, à Urumqi, capitale de la province chinoise à majorité musulmane du Xinjiang, située dans le nord-ouest du pays. L'agence de presse officielle Chine nouvelle, qui avait d'abord fait état de 3 morts, affirmait que ces derniers étaient des Chinois hans, les émeutiers étant des membres de la communauté turcophone musulmane ouïgoure, qui exprime régulièrement sa frustration d'être placée sous la tutelle politique chinoise.
Le gouvernement provincial s'en est immédiatement pris à la figure de proue de la dissidence ouïgoure, Rebiya Kadeer, en exil aux Etats-Unis après avoir été emprisonnée entre 1999 et 2005. Elle est accusée d'avoir "fomenté" les émeutes, celles-ci ayant pu être la conséquence d'un grave incident qui avait opposé, le 25 juin, dans une usine de jouets de la province de Canton, des Ouïgours et des Hans : des ouvriers turcophones avaient été accusés d'avoir essayé de violer une Chinoise han. Deux musulmans étaient morts dans des bagarres, provoquant la colère des Ouïgours d'Urumqi et l'émeute de dimanche.
Selon la version des médias officiels, environ 3 000 Ouïgours se sont rassemblés dans les grandes artères du centre de la ville, fracassant les vitrines, incendiant des véhicules, pillant des magasins et s'attaquant à des passants. Les organisations ouïgoures évoquent au contraire une manifestation pacifique violemment réprimée. Des images diffusées à la télévision ont montré des émeutiers renversant une voiture de police, une fumée noire montant des bâtiments incendiés, des jeunes femmes au visage couvert de sang en pleurs dans la rue. Le calme serait revenu sur place lundi. Les autorités locales ont prévenu que des quartiers entiers seraient bouclés.
Les 8 millions de musulmans turcophones vivant au Xinjiang constituent la majorité de la population de cette province, régulièrement théâtre de troubles plus ou moins sérieux et dont le caractère potentiellement volatil est utilisé par Pékin pour justifier sa politique de main de fer.
En juin, la police chinoise a annoncé y avoir démantelé sept "cellules terroristes". En avril, deux Ouïgours ont été exécutés dans la ville de Kashgar après avoir été condamnés à mort suite à leur participation à un attentat aux circonstances mal élucidées, en 2008, lors duquel 17 policiers avaient été tués. En mars, le président du gouvernement régional, Nur Bekri, avait prévenu que, cette année, alors que la Chine s'apprête à célébrer le 60e anniversaire de la République populaire, "la situation au Xinjiang sera plus délicate sur le plan de la sécurité, notre tâche plus dure et la lutte plus rude".
Les images de violence dans Urumqi rappellent celles de Lhassa, en mars 2008, quand des émeutiers tibétains s'en étaient pris à des commerçants hans. Le parallèle avec Urumqi, où les Chinois hans font une fois de plus les frais de la colère d'une minorité, illustre, sinon l'ampleur de la fracture ethnique en Chine, tout du moins la frustration exprimée par ceux que le pouvoir bride culturellement et socialement.
L'intégration de l'ancien "Turkestan oriental" n'a cessé de poser des problèmes à la République populaire. Depuis les attentats du 11 septembre 2001, Pékin n'a cessé de resserrer son contrôle. En 2005, un porte-parole du ministère de la sécurité publique avait accusé les "séparatistes" d'entretenir des "liens directs" avec Al Qaida. Les mêmes autorités soutenaient à l'époque que, depuis dix ans, 160 personnes avaient été tuées au Xinjiang au cours de "260 incidents".
Régulièrement, le pouvoir chinois accuse le Mouvement islamique du Turkestan oriental (ETIM) d'alimenter le "séparatisme" ouïgour tandis que les défenseurs des droits de l'homme soupçonnent Pékin de donner à ce mouvement plus d'importance qu'il n'en a pour justifier la répression.