L'EXPRESS
DHARAMSALA, Inde - Le dalaï-lama préconise que les Tibétains en exil adoptent le système démocratique pour se choisir un nouveau dirigeant.
Dans un enregistrement vidéo diffusé samedi soir à plusieurs centaines de moines, de religieuses et de laïcs réunis à Dharamsala, où siège le gouvernement tibétain en exil dans le nord de l'Inde, le chef spirituel et politique des Tibétains a également estimé qu'il n'était plus essentiel de confier la direction de son peuple à une seule personne.
"Les dalaï-lamas ont assuré la direction temporelle et spirituelle au cours des 400 à 500 dernières années. Cela a sans doute été utile, mais cette période est révolue", a déclaré le prix Nobel de la paix dans cet enregistrement, selon une traduction fournie à Reuters.
"Aujourd'hui, il est clair pour le monde entier que la démocratie est le meilleur système en dépit de ses inconvénients mineurs. C'est pourquoi il est important que les Tibétains soient également en phase avec le reste de la communauté mondiale", a-t-il ajouté.
Le dalaï-lama, qui est âgé de 73 ans et a connu l'an dernier des problèmes de santé, avait déjà évoqué sa succession en déclarant que ce sera aux Tibétains de choisir de perpétuer ou non l'institution spirituelle après sa mort, ou d'ordonner une élection parmi les Tibétains de l'étranger.
Il pourrait aussi désigner lui-même un successeur parmi les membres du gouvernement en exil. Un collège de moines pourrait tout aussi bien sélectionner un dirigeant au sein de ses propres rangs, ce qui ôterait le caractère mystique au processus de sélection traditionnel.
VACANCE DU POUVOIR
"Il est dangereux de confier toutes les responsabilité
"En réalité, un changement est à l'oeuvre dans la responsabilité du dalaï-lama en tant que chef spirituel et politique. C'est, je crois, une très bonne chose (...). L'ère au cours de laquelle un chef religieux devait assumer la direction politique est révolue."
Beaucoup de Tibétains redoutent que la mort du dalaï-lama débouche sur une vacance du pouvoir dont la Chine pourrait profiter pour renforcer son emprise.
Pékin affirme que la désignation du dalaï-lama doit se conformer aux "conventions historiques" et être validée par les autorités chinoises.
Selon la Chine, la réincarnation du dalaï-lama doit être choisie en tirant au sort dans une urne en or offerte aux Tibétains par les empereurs mandchous de la dynastie Qing.
Seul le gouvernement central chinois est selon elle habilitée à exempter de ce rituel un candidat à la succession, établi en 1793 dans "l'article 29 de l'ordonnance pour un gouvernement plus efficace au Tibet".
Mais le dalaï-lama a laissé entendre que son possible successeur pourrait se trouver hors de Chine, ce qu'exclut Pékin, ou que les Tibétains pourraient se prononcer par un vote sur le maintien ou non de la désignation d'un moine comme chef spirituel et politique de son peuple.
Les Tibétains en exil ont élu pour la première fois en 2001 un Premier ministre, baptisé Kalon Tripa. Le dalaï-lama avait alors parlé d'un "succès magnifique".
L'actuel Premier ministre, Samdhong Rinpoche, un moine tibétain et érudit bouddhiste, a effectué deux mandats. Le dalaï-lama a souvent déclaré qu'il était en "semi-retraite" en tant que dirigeant politique, en demandant à Rinpoche de se charger de la conduite des affaires.
"Etant donné que l'élection a lieu tous les cinq ans, que le dalaï-lama soit là ou non, le système politique en exil restera sûr, stable et viable sur le long terme", a estimé le lauréat du Nobel de la paix dans son enregistrement vidéo.